Lilian Lacourpaille, la science derrière la performance
Publié par EchoSciences Pays de la Loire, le 22 avril 2024 1.2k
Qu’iels se consacrent à la biologie, à l’informatique, aux mathématiques ou à d’autres domaines, les chercheuses et chercheurs ligérien·ne·s contribuent activement à élargir les horizons de la recherche en Pays de la Loire. Nous sommes donc partis à leur rencontre aux quatre coins de la région pour rencontrer des scientifiques remarquables. À travers ces portraits imagés, vous découvrirez des chercheuses et chercheurs engagé·e·s et passionné·e·s.
Lilian Lacourpaille est maître de conférences à l’UFR STAPS de Nantes Université. En 2023, il a été distingué en tant que lauréat du dispositif Étoiles Montantes de la Région Pays de la Loire pour son projet innovant, QUADRATURE. Ce projet scientifique réunit recherche et innovation pour répondre aux besoins des professionnels du sport en proposant de nouveaux outils de suivi de l’effort musculaire. Son ambition est de contribuer à une meilleure prévention des risques de blessure, tout en exploitant les avancées scientifiques pour offrir des solutions concrètes aux praticiens du sport.
C’est à Nantes que nous nous sommes rendues pour rencontrer Lilian Lacourpaille, et c’est à Nantes que ce dernier a bâti son parcours professionnel au sein de l’UFR STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives) de Nantes Université. À ses débuts, passionné de sport et pratiquant assidu, il souhaitait s’orienter vers des études en kinésithérapie. Mais après un stage dans le Laboratoire « Motricité, Interactions, Performance », il choisit de pivoter, changer de voie et poursuivre sa course dans la recherche en STAPS. « L’idée de créer de la connaissance […] Aller interroger des choses dont personne n’a la réponse c’est ça qui m’a intéressé » confit-il. Il poursuit en thèse dans ce même laboratoire, dirigée par Antoine Nordez et François Hug, qu’il considère encore aujourd’hui comme ses mentors. « Je sens qu’à leur côté je continue d’apprendre beaucoup de chose […] Je les remercie pour tout ce qu’ils m’ont apporté. »
Avant de réintégrer le laboratoire qui a vu naître ses premiers travaux de recherche, Lilian Lacourpaille est passé par l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance). Durant deux années, il a accompagné la performance sportive d’athlètes de haut-niveau tout en menant une activité de recherche axée notamment sur la prévention des blessures musculaires. Aujourd’hui, Lilian est de retour au Laboratoire « Motricité, Interactions, Performance » grâce à un post-doctorat sur un projet de compréhension des mécanismes sous-jacents au développement d’une tendinopathie d’Achille. À la suite de cette expérience, il devient maître de conférences à l’UFR STAPS, où il a retrouvé ses mentors.
« La performance sportive, qu’elle soit centrée sur la performance en elle-même ou la blessure pour que les athlètes puissent s’entrainer et performer demain, ce sont toujours des choses qui m’ont intéressé »
Entre recherche et innovation
Allier recherche et innovation, c’est l’ambition de Lilian Lacourpaille. Les travaux qu'il a menés durant son post-doctorat ont révélé l'existence d'une signature d'activation musculaire propre à chaque individu. Cette découverte souligne la diversité des stratégies musculaires adoptées par les êtres humains dans des activités telles que la marche ou le pédalage. Ainsi, notre manière d'utiliser nos muscles varie d'un individu à l'autre, comme le révèle cette signature musculaire, qui est simplement une extension de l'observation des mouvements humains, reflétant ainsi la singularité de chacun. « C’est pour cette raison que l’on est capable de reconnaitre des individus, des amis qui marchent dans la rue de dos »
À partir de ce constat, la recherche explore deux questions fondamentales : pourquoi chaque individu est-il unique, et quelles sont les conséquences de ces signatures musculaires individuelles ? C'est cette seconde interrogation qui retient particulièrement l'attention de Lilian dans le cadre de ses travaux de recherche. Il s'attache avant tout à déterminer si les schémas d'activation musculaire spécifiques peuvent favoriser le développement de la masse musculaire et renforcer les muscles lors de l'entraînement. Ou encore, si ces stratégies individuelles d'activation musculaire peuvent potentiellement accroître les risques de blessure. En analysant la signature musculaire, Lilian vise à éclairer les implications de ces stratégies sur la santé musculaire, offrant ainsi de précieuses perspectives pour la prévention des blessures et l'optimisation de la performance.
Puis, il y a l’innovation, c’est le second objectif de ce projet. L’idée est de fournir aux professionnels du sport et de la santé des outils permettant d'analyser les conséquences de l'activation musculaire. L’objectif est de leur permettre d’élaborer des programmes de prévention, de rééducation qui considéreront ces signatures individuelles. Comment ? Avec un textile connecté, un short intelligent, capable de mesurer non seulement cette signature musculaire, mais également d'autres paramètres. Cette technologie permettra d'accompagner les athlètes de haut niveau dans l'évaluation du coût musculaire de leurs activités, offrant ainsi une approche personnalisée de la performance et de la santé musculaire.
Le coût musculaire représente l'effort physique nécessaire d'un point de vue musculaire pour l'individu lors d’une activité. Pour évaluer ce coût, il est nécessaire de quantifier trois paramètres :
- L’activité musculaire soit comment le cerveau utilise les muscles pendant l’activité et comment il souhaite les activer.
- La longueur à laquelle le muscle agit. Elle est déterminée par des capteurs qui enregistrent les angles articulaires. Ces données sont ensuite traitées à l'aide de modèles pour estimer à la fois l'angle articulaire et la longueur du muscle.
- La vitesse du mouvement qui représente la variation de la longueur du muscle dans le temps.
Ces paramètres permettent de connaître l’amplitude des mouvements qui sont imposés à un muscle et donc le coût au mouvement.
Lilian Lacourpaille espère que l'outil qu'il développe avec son équipe permettra aux professionnels du sport de suivre en continu ces paramètres tout au long des séances d'entraînement. L'identification des muscles présentant une augmentation du coût musculaire au cours de ces sessions pourrait révéler ceux susceptibles de présenter un risque de blessure. En définitive, l'objectif est de déterminer si cette approche de suivi contribue à réduire les risques.
« J’aime les connaissances fondamentales, mais j’aime quand elles ont une utilité plutôt à court terme »
Pour mener à bien ce projet, Lilian Lacourpaille bénéficie du soutien financier du dispositif Étoiles Montantes de la Région Pays de la Loire et est accompagné par la SATT Ouest Valorisation pour son projet QUADRATURE. Il s'est également entouré de deux entrepreneurs chevronnés, Delis Ahou (MAD-UP) et Kévin Cathé-Karama, ainsi que d'un ingénieur pour le développement technique et technologique. Sur le plan de la recherche, il renoue la collaboration avec François Hug, directeur du laboratoire, et d'Arnaud Caillet, post-doctorant à l'Imperial College of London.
En fin de compte, l’objectif principal est de démontrer que la signature musculaire a du sens physiologiquement et que « demain cette information permettra d’adapter la prise en charge des professionnels de santé ou du sport ».