Chaque début d'année, Terre des Sciences propose un cycle de conférences vulgarisées en astronomie, en partenariat avec : le Laboratoire de Planétologie et Géosciences (LPG) [CNRS/ Nantes Université / Université d'Angers / Le Mans Université]), l'association étudiante Curiosity-ESEO [École d'Ingénieurs d'Angers] et l'association Ciel d'Anjou [passionné.es d'Astronomie].

Retour sur les thèmes du cycle 2022 en  10 questions :

"LA SAGA DES ASTRONOMES" :  Jean-Pierre Martin : physicien et membre de la Société astronomique de France

1/ Quelles ont été les principales découvertes en astronomie ?

JP Martin : Elles ont été faites principalement par les Grecs il y a plus de 2000 ans : la Terre est ronde,  sa circonférence est mesurée, ils découvrent les planètes.

Plus tard Copernic comprend que la Terre n'est pas au centre du monde, notion progressivement acceptée par tous. Galilée dirige sa lunette vers le ciel et prouve aussi que la Terre tourne autour du Soleil, mais c'est Newton qui formalise toutes ces nouvelles idées avec sa théorie de la gravitation. On fait des progrès mais on ne connait toujours pas la taille du système solaire, c'est Halley qui va galvaniser les astronomes de son époque pour appréhender ces distances avec les mesures faites durant le transit de Vénus. Le monde devient immense.

le XXème siècle frappe à la porte, Einstein améliore Newton avec sa théorie de la Relativité Générale : nous sommes dans un espace-temps, la matière courbe l'espace. énergie et matière sont les deux faces d'une même carte. l'univers est en expansion. De nouveaux défis nous attendent : matière noire, énergie noire, antimatière etc..

2/ Pourquoi l’astronomie est-elle considérée comme mère de toutes les sciences ?

JP Martin : Les Hommes, même primitifs, ont été subjugués par le ciel étoilé, ils se sont posés des questions, cela a été le début de la science. Ils se sont aperçus de la répétitivité des saisons, utile pour l'agriculture. Les Hommes ont donc mis au point différents calendriers pour maitriser le temps. L'astronomie a certainement été la plus ancienne des sciences. D'ailleurs, la notion de sciences n'existait pas, à l'époque ancienne, on était tous "philosophes" ! L'astronomie nous faisait nous intéresser à la nature en général. L'astronomie nous a fait réfléchir à la façon dont notre monde s'est créé en développant de nouvelles notions de physique, terrain parfois dangereux (conflit avec les religions). L'astronomie va finalement donner naissance à la cosmologie : d'où venons nous, quel est notre avenir, univers fini ou infini? En fait, plus que tout, l'astronomie a permis de faire évoluer les pensées, de créer de nouveaux paradigmes.

"FAKE NEWS EN ASTRONOMIE" : Sarah Anderson, doctorante à l'Institut UTINAM, CNRS et Université de Franche-Comté

1/ De nombreux domaines scientifiques sont malheureusement contaminés par les " fake news " ; l'astronomie ne fait pas exception. Auriez-vous un exemple de " fake news " dans ce domaine?

S. Anderson : On trouve souvent de fausses informations, même sur des sites réputés. Celle qui revient souvent est la photo ci-dessus : ce serait un trou dans l’univers, un néant gigantesque, un vide où il n’y aurait ni matière, ni matière noire. Et pourtant, on retrouve cette photo illustrant des articles sur la matière noire... Mais en réalité, c’est un nuage moléculaire appelé "Barnard 68" dont son gaz et sa poussière absorbent la lumière visible des étoiles cachés derrière ! Avec des images comme celle-ci, on est facilement pris au piège. À la photo, on attache une histoire qui n'est pas réelle, et on l'envoie sur les réseaux sociaux...

Un autre exemple est cette célèbre photo ci-dessous de « la Terre vue de Mars » : malheureusement, il s'agit d'une photo prise dans une application type Planétarium. Dommage !

2/ Quels sont alors les outils permettant d’identifier les fausses nouvelles en astronomie ?

S. Anderson : l'essentiel est de remonter à la source ! Beaucoup de gens partagent des informations à partir de faux comptes avec des noms type "Incredible physics". Mais les images ne sont même pas envoyées par des humains, mais des "bots", des logiciels intelligents conçus très souvent pour converser avec l'utilisateur d'un site. Ils ne créditent aucun des contenus qu'ils publient, ils ne renvoient pas à de véritables informations. Ils partagent simplement l'image ou la vidéo. Cette image ou cette vidéo peut être totalement fausse, mal interprétée ou un détail perdu en cours de route (type photo simulé de la terre vue de mars).

Pour éviter de contribuer à ce problème, ne repartagez jamais une photo ou vidéo sans attribution. Si vous ne connaissez pas l'origine du document, vous ne devez pas la partager. Cela évite de diffuser encore plus ces "fake news". S'il y a quelque chose d'étonnamment surprenant, soyez toujours méfiant : cherchez sur Google l'information que vous venez de voir suivi du mot ‘fake’, puis, regardez ce qui apparait.  L’important est toujours de rester curieux ! Suivez de vrais scientifiques ou des vulgarisateurs/médiateurs de confiance qui prennent le temps de décrypter pour mieux vous informer !

"LE SOLEIL",  Frédéric Baudin : enseignant-chercheur à l'Institut d'Astrophysique Spatiale d'Orsay

1/ Comment est né le soleil ? Pourquoi le Soleil est-il en rotation ?

F. Baudin : Le Soleil s'est formé par la contraction d'un nuage moléculaire, formé de gaz et de poussière, contraction due à la propre gravité de ce nuage. Il est composé principalement d'hydrogène et d'hélium, composants initiaux de l'univers à la suite du big bang, mais aussi de petites quantités d'éléments plus lourds (carbone, oxygène, azote, fer etc... et même uranium) qui ont été formé au sein d'une supernova qui a explosé auparavant.
Ce nuage énorme était animé d'une certaine dose de mouvements de rotation qui se sont amplifiés lors de la contraction sous l'effet classiquement appelé effet du patineur dont la rotation s'accélère quand il replie ses bras près du corps (on parle de conservation du
moment cinétique).

2/Pourquoi le Soleil a-t-il des tâches ?

F. Baudin : À l'intérieur du Soleil existe un effet de génération de champ magnétique, appelé effet dynamo. On soupçonne cet effet localisé à plus de 200000 km de profondeur, mais ce champ se développe ensuite vers la surface et y prend la forme de tubes. Les taches sombres observées sont l'endroit où ces tubes émergent à la surface. S'ils sont relativement sombres, c'est que dans ces tubes, au niveau de la surface, la température est plus basse que sur le reste de la surface. Cela est dû au blocage que le champ magnétique opère sur les remontées de matière chaude, sous forme de convection, qui ont lieu dans les zones non magnétiques.

"ENVISION ESA : À LA DÉCOUVERTE DE VÉNUS !"  , Pascal Rosenblatt : chercheur au LPG (CNRS/ Nantes Université / Université d'Angers / Le Mans Université )

1/ De quoi est constituée Vénus ? Quelle est la température moyenne à sa surface ?

P. Rosenblatt : Vénus est constituée de roches comme la Terre, Mars, Mercure et la Lune. Les roches vénusiennes sont probablement d’origine volcanique comme le suggère les mesures des sondes soviétiques Venera qui se sont posées à la surface dans les années 70-80. Ces sondes n’ont pu fonctionner qu’au maximum 4 heures étant donné les conditions redoutables de la surface: 500 °C et 90 bars de pression. Néanmoins, ces quelques mesures sont précieuses pour comprendre la formation et l’évolution de Vénus.

2/ En quoi consiste le projet EnVision ?

P. Rosenblatt : Le projet EnVision est une sonde qui va être envoyée en orbite autour de Vénus en 2031. C’est une sonde d’exploration scientifique qui va cartographier la surface avec une résolution inégalée à ce jour: jusqu’à 10 mètres de résolution spatiale. Ces images détaillées de la surface ne sont cependant pas des images classiques prises par des caméras comme pour Mars , mais par des radars imageurs (radar à synthèse d’ouverture). La technologie radar doit être utilisé pour Vénus car les nuages d’acide sulfurique situés à 60 km d’altitude sont opaques aux rayonnements dans le visible. Cette sonde effectuera aussi d’autres expériences, telle que la mesure très précise du champ de gravité. C’est cette expérience qui est pilotée au Laboratoire de Planétologie et Géosciences à Nantes. La mission EnVision est une mission de l’agence spatiale européenne et sera exploitée en orbite vénusienne jusqu’en 2038.

"EXPLORATION PASSÉE & FUTURE DE LA LUNE", Serge Chevrel : astronome à l'IRAP, Observatoire Midi-Pyrénées, Université Paul Sabatier -Toulouse III

1/ Comment la Lune a-t-elle été créée ? Pourquoi la Lune n’est-elle pas une planète ?

S. Chevrel : La Lune est née de la collision d’un objet (nommé Théia) avec la Terre. Elle est classée (UAI) comme étant un satellite, mais en taille elle est le neuvième corps solide du système solaire. Sa structure interne (noyau-manteau-croutes) est celle d’une planète. La Lune ayant connu une activité interne relativement courte, on trouve à sa surface des roches extrêmement vieilles alors que sur les planètes elles ont disparues, ou elles sont très mal préservées. De ce fait la Lune est unique car elle permet de comprendre l’histoire précoce d’un corps planétaire.

2/ Pouvez-vous nous parler du programme ARTEMIS ?

S. Chevrel : Le programme ARTEMIS a pour objectif un retour et une installation durable de l’Homme sur Lune pour préparer l’exploration de Mars : apprendre à vivre en milieu hostile en utilisant les ressources disponibles sur place. Pour les scientifiques, c’est l’occasion d’explorer la Lune in situ après APOLLO, et d’augmenter considérablement nos connaissances sur un objet qui est primordial pour comprendre la formation et l’évolution des planètes telluriques. Une grande aventure humaine et scientifique va bientôt commencer.

 Interview Echosciences réalisé par : Audrey Lavau-Girard, programmatrice Terre des Sciences.

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Pour le replay de nos "Cycles astronomie" [partenaires : Terre des Sciences, LPG (CNRS/ Nantes Université / Université d'Angers / Le Mans Université), association étudiante Curiosity-ESEO, association de passionnés Ciel d'Anjou ?  cliquez ici !