Traitement des fumées d’incinération : les colonnes de lavage sont-elles efficaces pour la capture des nanoparticules ? Évaluation expérimentale des performances d’un pilote de lavage au laboratoire

Publié par Emmanuel Adah, le 20 septembre 2024

Un nombre croissant de nanomatériaux manufacturés est présent dans les produits industriels et de consommation courante. Compte tenu de l'absence de réglementation sur leur fin de vie, les nanomatériaux manufacturés sont actuellement traités comme n'importe quel autre déchet, généralement par incinération en raison de leur nature potentiellement dangereuse. Pour limiter les émissions de particules dans les usines d'incinération, on utilise une combinaison de technologies pour l’épuration des gaz de combustion telles que les cyclones, les précipitateurs électrostatiques, les filtres à manches et les laveurs. Les laveurs sont principalement conçus pour traiter les polluants gazeux acides, mais participent aussi à la collecte des particules.

Le travail de thèse d'Emmanuel Adah à IMT Atlantique (2019-2023) a consisté à étudier l'influence de trois paramètres de fonctionnement sur l'efficacité de collecte de nanoparticules par un laveur à échelle pilote : le débit de gaz entre 35 et 55 Nm3.hr-1, le débit de liquide entre 1,6 et 4,8 L.min-1 et le diamètre des gouttelettes entre 60 et 80 µm. Le pilote a été conçu et exploité de manière à représenter une colonne de lavage à grande échelle de l’unité d’incinération II de Trédi à Salaise (38).

Le laveur de laboratoire a une hauteur de 1,9 m et un diamètre de 0,3 m et comprend quatre étages de pulvérisation. Les buses de pulvérisation génèrent des gouttelettes d'eau d'un diamètre moyen de 60 à 80 µm selon la pression d'écoulement du liquide. Un ventilateur centrifuge situé en aval du laveur assure le débit d'air dans le dispositif expérimental. Le conditionnement de l’air se fait en deux étapes : tout d'abord, il est chauffé à 70°C, puis une injection de vapeur de 7 à 12 kg.hr-1 est réalisée (la valeur dépend du débit de gaz afin d'obtenir une humidité relative de 1%) et enfin l'air est chauffé à 200°C. À ce stade, des nanoparticules de carbone sont injectées (générateur DNP 2000 Palas). À l'entrée et à la sortie de l'épurateur, un comptage granulométrique des particules est effectué après dilution (SMPS, Grimm). Les résultats d’efficacité de capture des nanoparticules par le laveur sont étudiés pour trois tailles de particules - 24, 42 et 62 nm.

Photographie du dispositif expérimental installé dans la halle de recherche du département Systèmes Énergétiques et Environnement d’IMT Atlantique / laboratoire GEPEA UMR CNRS 6144

Les résultats expérimentaux ont confirmé que les performances de capture des nanoparticules par les laveurs peuvent être modifiées par les conditions de fonctionnement. Le diamètre des gouttelettes joue un rôle important sur les performances de l'épurateur. Des gouttelettes de petite taille favorisent la collecte des nanoparticules. L'efficacité maximale de collecte de 52% a été obtenue avec un diamètre des gouttelettes de 60 µm, et l’efficacité de collecte minimale de 30% a été obtenue pour un diamètre de gouttelettes de 80 µm. Pour les trois tailles de particules rapportées (24, 42 et 62 nm), une augmentation du débit de liquide favorise l'efficacité de collecte du laveur. Pour un débit de liquide donné, l’augmentation du débit de gaz conduit à une augmentation de l’efficacité de collecte jusqu’à une valeur de débit de gaz limite à partir de laquelle l’efficacité de collecte diminue en raison d’un phénomène d’entraînement / évaporation des gouttelettes dans le flux d’air plus ou moins marqué suivant la taille de ces dernières.

Cette étude a ainsi montré que les laveurs à pulvérisation présents dans les usines d'incinération des déchets participent à la collecte des nanoparticules. Il y a donc transfert de nanoparticules de la phase gazeuse à la phase liquide.

Ce travail a été réalisé à IMT Atlantique et financé par l’ADEME et la Région Pays de la Loire (n°TEZ19-002) ainsi que Séché Environnement. Les personnes ayant participées à l’étude sont Emmanuel ADAH, Aurélie Joubert et Laurence Le Coq (IMT Atlantique), Marc Henry, Sylvain Durécu (Séché Environnement).