[Objectif Végétal] Connaître les graines pour améliorer la résistance des semences aux stress environnementaux

Publié par EchoSciences Pays de la Loire, le 29 mars 2023   880

Avec le réchauffement climatique, les périodes à venir de longues et intenses sécheresses vont considérablement impacter la stabilité alimentaire. La tolérance des plantes à la chaleur et au manque d’eau étant limitée, leur productivité sera pénalisée et par conséquent les rendements agricoles


Il existe une capacité observée chez certains organismes qui permet leur survie à la déshydratation : la tolérance à la dessiccation. Elle est activée par des mécanismes moléculaires qui rendent possible la préservation de l’organisme durant de longues périodes de basses teneurs en eau. Une capacité que l’on retrouve chez la graine. En identifiant ces mécanismes moléculaires présents chez les graines, les scientifiques de l’IRHS (Institut de Recherche en Horticulture et Semences) espèrent pouvoir les réactiver dans les plantes lors de la période de croissance.

Identifier les gènes impliqués dans la qualité germinative

Au sein de l’IRHS, l’équipe du Seed Lab s’est intéressée à l’impact des stress [agressions] environnementaux sur les critères de qualité des graines comme la qualité nutritionnelle ou germinative. Pour les entreprises semencières, ces critères de qualité sont importants afin de réaliser une récolte de “bonne qualité” assurant aux exploitants une bonne rentabilité économique. En fonction des conditions de production (température, disponibilité en eau, qualité des sols), ces caractères de qualité de la graine peuvent être modifiés. Cette modification est connue sous le nom de plasticité phénotypique des plantes. En conditions “naturelles”, cette plasticité peut intervenir pour préserver la plante face à des stress extérieurs comme le manque d’eau qui peut ralentir sa croissance.

Le projet BASIS (2016) avait pour objectif l’identification des gènes impliqués dans la modification de ces caractères de qualité afin de les muter ou limiter leur effet. À partir d’une plante modèle de la famille des légumineuses, la Luzerne, les chercheurs ont identifié un gène (MIEL1) qui permettrait d’obtenir des graines germant de manière homogène quels que soit les stress intervenant pendant leur production.

Résistance à la sécheresse

La dessication est un état de forte déshydratation chez un être vivant. Certaines plantes connues sous le nom de plantes “reviviscentes” ou “de résurrection” présentent la capacité à résister à la dessication. Elles paraissent mortes à l’état sec mais reverdissent à la moindre humidité dans l’air. Cette capacité a été conservée chez presque toutes les semences de notre agriculture, ce qui rend possible leur survie à l’état sec et leur dissémination. Elle est ensuite désactivée chez les plantes après la germination. Elle aurait hypothétiquement été perdue durant l’évolution de ces plantes dites “supérieures” ou vasculaires [plantes à tige, feuilles et racines dans lesquelles l’eau puisée dans les racines circule dans la plante] au profit d’une croissance plus rapide.

Avec le projet epiDT, les scientifiques se sont attachés à comprendre les mécanismes moléculaires qui activent de cette capacité de tolérance à la dessication. Cela consiste à identifier l’ « interrupteur moléculaire » qui contrôle ces mécanismes pour pouvoir les activer ou non. Les chercheurs ont pu mettre en évidence que l’inactivation de certains gènes leur permettait d’adapter la durée de résistance à la sécheresse des graines germées. En conséquence, d’un point de vue agronomique, il serait possible de générer des espèces capables de survivre à une forte sécheresse juste après le semis et le développement de la plantule. Une analyse de la possibilité d’étendre cette tolérance plus longtemps est en cours.

Le projet Deswitch (2020 - 2022), coordonné par Jérôme Verdier, vise à caractériser l’interrupteur moléculaire qui, une fois activé, permettrait aux plantes d’induire ce mécanisme de tolérance à la dessiccation en période de sécheresse. Une bonne compréhension de ce mécanisme permettrait de pouvoir l’activer (1) en période de fortes sécheresses et (2) dans les graines “récalcitrantes” comme le cacao, le café ou l’avocat, qui sont intolérantes à la dessication et ne peuvent ainsi pas se stocker.

Article écrit par Maéna Gérault, Terre des Sciences, pour la brochure RFI Objectif Végétal.